GERARD PAYEN : « 3 A 4 MILLIARDS DE PERSONNES ONT BESOIN D’UN MEILLEUR ACCES A L’EAU » (Paris)

Les besoins en eau potable dans le monde sont sous-estimés : des milliards de personnes sont concernées

Les besoins d’amélioration de l’accès à l’eau potable dans le monde sont mal connus. Les informations statistiques disponibles au niveau mondial sont peu détaillées. Les politiques publiques sont cependant orientées par l’information disponible. Ainsi, l’actuel Objectif du Millénaire pour le Développement est-il mesuré selon un indicateur qui ne concerne qu’un accès à l’eau minimum n’assurant pas la potabilité de l’eau. L’affirmation souvent répétée selon laquelle environ « 900 millions de personnes n’ont pas accès à l’eau potable » est très éloignée de la réalité.

Si la notion de potabilité est assez claire, celle d’accès à l’eau potable est beaucoup plus floue, laissant la porte ouverte à de multiples interprétations. En outre, le droit à l’eau potable, reconnu comme un droit de l’homme en 2010, requiert des modalités d’accès à l’eau qui vont plus loin que la simple « potabilité » de l’eau.

Selon les critères utilisés pour définir un accès satisfaisant à l’eau potable, on peut évaluer le besoin actuel à moins d’un milliard de personnes (1 personne sur 8) ou à près de 4 milliards (plus de la moitié de la population mondiale).

Malgré l’absence de données statistiques précises, des raisonnements permettent d’utiliser l’information disponible pour estimer les ordres de grandeur des différents besoins d’accès à l’eau potable. Les estimations de l’auteur conduisent à affirmer que ce sont des milliards de gens qui ont besoin d’une amélioration de leur accès quotidien à l’eau.

Au moins 1,9 milliard de personnes n’utilisent que de l’eau malsaine, dangereuse pour leur santé, tandis que 3,4 milliards utilisent au moins de temps en temps une eau de qualité incertaine. La potabilité de l’eau n’est pas assurée pour un très grand nombre de personnes, environ la moitié de l’humanité.

Le droit à l’eau potable a été reconnu par la communauté internationale en 2010. Sa mise en œuvre concerne au moins autant de personnes que la potabilité de l’eau, et peut-être même davantage, car la potabilité n’est qu’un des éléments de ce droit. Il y en a d’autres comme l’accessibilité, l’acceptabilité, le cout abordable de l’eau. Au seul motif de la potabilité, plus de deux milliards de personnes n’ont pas leur droit à l’eau satisfait. Le nombre de personnes ayant besoin d’avoir leur droit à l’eau potable mieux satisfait semble dépasser les 3,4 milliards.

L’accès à l’eau crée une véritable fracture sociale : il y a d’un côté ceux qui ont de l’eau saine en permanence à domicile. Ils ne perçoivent pas vraiment la valeur de l’eau potable ni la chance dont ils bénéficient. De l’autre côté, il y a tous ceux qui ont un accès à l’eau plus difficile, plus risqué ou plus couteux. Ils sont bien plus nombreux, près de 4 milliards (environ 57 % de la population mondiale). L’eau potable a une valeur évidente pour eux mais ils n’y ont pas accès ou difficilement.

Les améliorations futures des statistiques des Nations Unies permettront de préciser ces estimations.

Ainsi, les besoins d’amélioration de l’accès à l’eau sont énormes. Ils ne concernent pas des centaines de millions de personnes mais des milliards. Un sursaut des politiques publiques est nécessaire pour assurer à chacun un accès satisfaisant à de l’eau véritablement potable.

Gérard Payen

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